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Ma vie avec moi...
12 mai 2008

Pour un beau mois de Mai où les présidents volent au vent

Bayrou, ce moucheron que Sarko n'arrive pas à écraser

François Bayrou est seul. Très seul. De plus en plus seul, exilé là-haut tout là-haut, au plus haut des gradins de l'Assemblée nationale avec les non inscrits, dans ce qu'il appelle « le pigeonnier de la liberté ». Solitaire donc, mais vivant. A ses côtés ne reste plus que son ami Pyrénéen, le fidèle Jean Lassalle, ce géant chantant qui bat des mains comme des ailes quand son chef tente de prêcher… dans le désert parlementaire. La droite fait en effet comme s'il n'existait plus, ne lui accordant pas même l'aumône d'un regard ou d'une attention lorsqu'il se manifeste. Le brouhaha du mépris accompagne ses rares propos. L'UMP se distrait ostensiblement, mais la gauche aussi, qui ne veut pas lui accorder davantage d'existence, encore moins peut-être, et vaque à son courrier comme à ses conversations quand le président de l'UDF s'exprime à la tribune de l'Assemblée nationale. C'est rare ; le règlement du parlement est fait justement pour que les orphelins de groupe soient réduits à la portion congrue. Or, la portion congrue, encore plus réduite après sa défaite aux municipales dans sa bonne ville de Pau, cette demi-portion que les derniers des derniers sénateurs UDF ont entrepris d'abandonner sous la férule exigeante du président de la République en personne, cet avorton du Centre ne perd pas le sourire.
Bayrou, « Lou ravi du Béarn » comme l'appellent méchamment ses ennemis, et il en a beaucoup, a été requinqué par les récentes enquêtes d'opinion qui prouvent qu'il existe encore. C'est la force de ce thermomètre-sondagier, il peut vous donner une « bonne » fièvre. Il y a d'abord eu le sondage CSA-Marianne qui lui accordait 19 % d'intention de vote pour la prochaine élection présidentielle. Soit un point de plus qu'après le premier tour de 2007, alors qu'il a raté l'entre deux tours et que la stratégie d'alliance tous azimuts aux élections municipales a été pour le moins erratique. Nicolas Sarkozy en a pourtant profité pour répéter la consigne d'extermination et s'énerver contre ceux qui ne la suivent pas, tel Alain Juppé : « il faut écraser l'infâme… ». Le chef de l'Etat est bien obsédé par ce moucheron dont il ne parvient pas à se débarrasser. Car la stratégie d'éradication poursuivie par le président en personne ne fait pas de doute. Il l'a suffisamment répété à ses proches, parfois avec colère, car leur écoute est trop molle, nonchalante : « Nous avons laissé Bayrou survivre en 2002 et il n'a cessé de nous pourrir la vie. Il faut éviter à tout prix qu'il puisse nous prendre des voix en 2012 ». Voilà pourquoi les manœuvres de déstabilisation ont repris de plus belle au Sénat - un sénateur en moins c'et de l'argent en moins pour le parti bayrouiste - et voilà pourquoi Sarkozy presse aussi le Nouveau Centre de se structurer et de s'organiser davantage ; le jeune Christophe Lagarde, député de Seine Saint-Denis est ainsi particulièrement mis en avant, car lui connaît bien Bayrou et peut donc lui faire mal… », dit-on à l'Elysée. Mais Bayrou commence à avoir le cuir vraiment épais, même si lui pèse cette quarantaine de pesteux qu'il doit subir avec Marielle de Sarnez. Tant que les Français et les militants ne le lâchent pas, ça va. Or non seulement ils ne l'ont pas rayé du paysage mais encore ils veulent le réintroduire dans le jeu. C'est lui qu'ils plébiscitent ainsi comme futur Premier ministre pour succéder à Fillon, loin devant Kouchner, Alliot-Marie, Juppé, Borloo, Dati… Il a en lui quelque chose de calme, de déterminé, de paysan, et pour cause, qui rassure face au président Zébulon. En dépit des critiques sur ses inconséquences et sa grosse tête, sa personnalité ne rebute pas. Mais plus encore, ses critiques de fond du sarkozysme sont partagées par les Français, alors qu'il les a exprimées le plus tôt et le plus durement : son refus de l'argent roi et du culte des idoles tocs comme de la réussite tic, son exigence de partage et d'équité, ses appels à plus de retenue dans l'exercice d'une fonction royale que ce spécialiste d'Henri IV a toujours voulue plus majestueuse et plus rassembleuse, son langage de vérité sur les déficits et son exigence de ne plus jeter l'argent par les fenêtres, sa détestation du modèle américain de consommation et de perte d'être… »etc… Sur le fond, les Français lui ont donné raison !
Mais les classes populaires et moyennes qui se détachent de Sarkozy vont-elles aller vers lui, qui ne parvient pas à constituer d'équipe ? Les perspectives sont plus souriantes aujourd'hui qu'hier : pour les élections européennes, ce sera plus facile qu'aux municipales avec la proportionnelle régionale. Et puis les militants n'ont pas déserté: alors que UMP et PS perdent plus de 30 % de leurs adhérents. Un constat le ravi : les foules déçues du sarkozysme ne se tournent pas d'enthousiasme, il s'en faut, vers une gauche préoccupée d'abord de ses affrontements nombrilistes. Bayrou, sûr de son coup, a prophétisé un éclatement du PS dont il attend avec impatience les retombées. Ca ne dépend pas de lui certes, et si le Parti socialiste échappait à ses démons de la division, là ce serait plus coton. Le patron du Modem n'est donc pas maître de son destin et paraît parfois plus enclin à accrocher sa charrue à sa bonne étoile qu'à creuser profond son sillon pragmatique. Mais Bayrou a le sourire confiant des nouveaux évangélistes qui ont vu Dieu ou la mort de près : il décrit avec sérénité le long chemin ouvert devant ses pas. Un chemin difficile, escarpé, un chemin d'épreuves souvent et de croix parfois, mais il avait prévu l'échec du sarkozysme, puis la fracture de la gauche et enfin sa percée. Il y a près de 20 ans, il me disait et me répétait en privé : « je créerai une force autonome, je me présenterai à la présidentielle : la première fois, je ferai un score à un chiffre, la seconde fois, ce sera à deux chiffre, la troisième fois, je gagnerai… ». Il y croit… Vous comprenez pourquoi Sarkozy, Copé et les autres veulent l'enterrer vivant.

Nicolas Domenach, Marianne2.fr

* * *

portrait_officiel_sarkozyEn effet, Sarko veut "la mort politique" de Bayrou, et personne ne semble s'en émouvoir. C'est normal. C'est le jeu. C'est digne de notre nabotléon, donc on laisse faire, il n'y a pas de quoi fouetter un chat. On découvre une note interne de l'Elysée décrivant la stratégie pour le priver de la mairie de Pau, en se mettant le candidat PS dans la poche et en cherchant une triangulaire, puis une autre note visant à saper le MoDem en le vidant de ses principales composantes, en les soudoyant, leur promettant monts et merveilles dans la majorité, ou en ressuscitant l'UDF. Mais personne n'en parle, c'est normal. Ce qui aurait fait scandale il y a encore quelques années est devenu un banal fait divers. C'est le lot de toute formation politique que d'être la cible des autres, mais quand ça atteint ces proportions, on est en droit de réclamer un temps soit peu de justice et de clarté. C'est démocratique qu'on dépense l'argent du contribuable pour tenter d'éliminer un opposant - le plus virulent des opposants soit dit en passant, car le plus éloigné de la politique sarkozyenne ? Non, ça ne semble troubler personne. Notre nabotléon a tous les pouvoirs, il n'en aura d'ailleurs jamais assez - la réforme des institutions qui s'amorce passera encore comme une lettre à la poste. Et le pays recule, sans qu'on s'émeuve. Notre nabotléon nous l'a demandé bien sagement : alors qu'il prônait le changement, la rupture, l'action, il faut qu'on attende encore quatre ans pour vérifier si le pays s'en sort, si sa politique apportera quelque chose. De toute façon, les échecs de sa politique sont dus à des erreurs de communication, il n'y est pour rien ( pas plus que pour ses éventuels succès donc ), ou alors c'est Fillon, le fusible qui va s'en prendre bien docilement jusqu'à Janvier pour mieux se venger après. Je vous le dis dès à présent : dans quatre ans, ce sera le même constat qu'aujourd'hui, mais en quatre fois pire. On a donc tout le loisir de contempler la paupérisation et les désastres irrémédiables de notre belle gouvernance. Ou de lui signifier toute notre désapprobation, pleine et entière. Le plus tôt sera le mieux.

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