Laporte du casino
Il y a trois ans, la patronne du casino du lac de la Magdeleine, à Gujan-Mestras
en Gironde, défraye la chronique de l’été sur le bassin d’Arcachon. Faute
d’obtenir du ministère de l’Intérieur l’autorisation d’installer des
machines à sous, l’établissement est promis à une mort certaine. En
bloquant les routes et multipliant les manifs sauvages, les quelques
vingt-cinq employés du casino cherchent à alerter Sarko, alors 1er flic
de France, en vacances dans la région. Peine perdue. C’est à ce moment
que Frédérique Ruggieri, la patronne du casino est approchée par un ami
illustre du futur président, un certain Bernard Laporte, connu du grand
public pour exercer la fonction d’entraîneur de l’équipe de France de
Rugby. « Il est venu m’assurer que j’aurais sans aucun
problème mes licences de jeux… à condition que je lui cède la moitié de
mes parts », se souvient-elle encore éberluée par l’indécente proposition. « Je l’ai envoyé au pelote », explique-t-elle. Deux ans plus tard, elle n’a toujours pas eu
l’autorisation du ministère de l’Intérieur d’installer les 50 machines
à sous auxquelles elle a droit. Même après avoir fait l’objet d’une
enquête positive des RG de la section « courses et jeux » !
Au sein de l’Ovalie, peu de fans savent que leur coach
préféré donne aussi dans les casinos. Il ne s’en vante pas. Pourtant,
cette passion pour les plaques et les jetons remonte à un peu plus de
dix ans. En 1996, Bernard Laporte acquiert en effet deux casinos sur la
côte atlantique, à Mimizan et Biscarosse. Officiellement, ses associés
sont deux anciens internationaux de rugby, William Téchoueyres et
Philippe Saint-André, et une famille corse les Guidicelli. Rapidement,
ils jettent leur dévolu sur un troisième établissement à Lacanau. Mais,
là, Bernard Laporte n’arrive jamais à obtenir sa licence de machine à
sous, indispensable à la rentabilité d’un établissement de jeux. Le
ministère de l’Intérieur du gouvernement Jospin bloque. Après avoir
pris connaissance du rapport d’enquête très défavorable des RG. Que
disent nos amis des courses et jeux ? Trois choses. Primo, les premiers
casinos de Biscarosse et Mimizan sont mal gérés, deuxio, l’origine des
fonds utilisés pour acquérir le casino de Lacanau n’est pas très clair.
D’où vient le soupçon ? D’une amitié très encombrante du futur
secrétaire d’État au sport avec une figure très connue du Milieu,
Robert Fargette dit « Ptit Bert ». Amateur de ballon ovale, le frère de
Jean-Louis Fargette, parrain du Var, abattu dans un règlement de
comptes en 1993 est alors un grand pote de Laporte. Il passe beaucoup
de temps dans les vestiaires du Stade Français, le club qu’entraîne
alors Laporte. Bernard Laporte s’associe même avec la famille Fargette
pour monter un resto à Paris, « les Princes » ( ça ne s’invente pas ).
Officiellement, l’argent de la pègre n’intervenait pas dans le tour de
table du casino de Lacanau. Mais, chez les RG on est toujours très
prudent. Les officiers conseillent alors amicalement à Laporte de ne
pas faire de vieux os dans le jeu. Il revend ses trois casinos en
juillet 2000. Quatre mois plus tard, « P’tit Ber » était abattu par
deux motards à la sortie d’un bar de La Valette…
Mais voilà, depuis ces années noires, Laporte a fait
ami-ami avec Sarko, toujours attiré par ce qui brille dans le show-biz
ou dans le sport. Le coach des Bleus est même un de ses protégés.
Coïncidence ? La place Beauvau ne voit aucun inconvénient, en fin
d’année dernière au retour du pote du ministre de l’Intérieur dans le
secteur du jeu. Fin 2006, Bernard Laporte a acquis 33 % du capital du
casino de Saint-Julien-en-Genevoix, à la frontière suisse… Un ministre
casinotier ? La situation est sans nul doute inédite dans la Vème
République. Il est vrai que le secrétaire d’État au sport a
changé d’entourage. « P’tit Ber » n’est plus de ce monde. Laporte
copine maintenant avec l’ancien porte-serviette du clan Zemmour, reconverti en brasseur
d’affaires et d’infos frelatées, le désormais célèbre Marc Francelet ! L’ami Marco, qui vient juste de sortir de deux mois à
Fresnes pour différentes malversations présumées par le juge Courroye.
Bref, le secrétaire d’État continue d’être bien entouré…
Or donc, la plainte de cette dame visant monsieur Laporte ayant été classée sans suite le 7 mars dernier ( puisque ce dernier prétend avoir tenu les propos ci-dessus "sur le ton de la plaisanterie" ), la Cour d'appel de Paris a ordonné ce vendredi 11 avril que soit instruite une seconde plainte de la dame pour "favoritisme", "acharnement" et "décisions discriminatoires", qui met en cause le ministère de l'Intérieur, notamment lorsqu'il était dirigé par notre bon nabotléon, mais aussi Dominique de Villepin et Michèle Alliot-Marie...